En voici une, qui me fait penser à nous : ne pas s'approcher des frelons...
La moucheDe sa vie une mouche
Jamais n’avait quitté
Nauséabond fumier
Pestilentielles couches
Mais de son tas sordide
De cette odeur fétide
Son âme toute entière
Brûlait de se défaire
Alors elle s’envola
Et bravant le destin
Aux abeilles se mêla
Seule mouche dans l’essaim
Besogneuse d’abord
Elle trima dans l’effort
Puis sa verve exerçant
Vit éclore un talent
C’est ainsi que d’en bas
La reine elle envoûta
Qui fit d’une ouvrière
Sa première conseillère
De son nouveau statut
Notre mouche était fière
Mais de miel bien repue
Ne sut s’en satisfaire
Elle briguait désormais
La gloire et les paillettes
Ardemment aspirait
A tenir la manchette
Et c’est bien en vedette
Qu’elle fit irruption
Dans la haute, la jet-set
La sphère des papillons
Dans cette illustre caste
Elle lança en fanfare
Un genre iconoclaste
La mode du vert canard
De sa célébrité
Notre mouche était fière
Mais de strass rassasiée
Ne sut s’en satisfaire
Alors sans précaution
Elle loucha vers le clan
Des grands et des puissants :
L’empire des frelons
Mais là, notre oratrice
Et son lot d’artifices
Entre brutes et bandits
Ne fit pas même un pli
Haines, coups, mensonges et ruses
Eurent raison de l’intruse
Qu’on renvoya fissa
A son infâme tas !
Et la bouseuse comprit
Qu'elle n'était pas armée
Pour ce monde de fumiers
Qu'un merdier plus pourri.
Sinon, juste pour le plaisir des oreilles, voici des variation rien n'est de moi, hein), sur le Renard et les Raisins
(à lire à haute voix, tout est dans les sonorités)Le Renard et les Raisins. (R) Certain renard gascon, d'autres disent normand,
Mourant presque de faim, vit au haut d'une treille
Des raisins mûrs apparemment,
Et couverts d'une peau vermeille.
Le galant en eut fait volontiers un repas ;
Mais comme il n'y pouvait atteindre :
« Ils sont trop verts, dit-il, et bons pour des goujats. »
Fit-il pas mieux que de se plaindre ?
L'Ocelot et les Oranges. (O)Un ocelot d'Oo, on ouït oncques de l'Orne,
À l'oesophage d'ogre, en l'oasis ombreuse
Observe onze oranges qui s'ornent
D'ocelles ocrées et ouateuses.
L'olibrius optait pour s'offrir ces objets ;
Mais offusqué d'obscurs obstacles :
« Oh l'ordure, ose-t-il, leur odeur m'outrageait. »
Opinez-vous à cet oracle ?
La Belette et les Bananes. (B) Une belette basque, ou basée à Bayeux,
Ballottant des bajoues, brigue au bord d'un bayou
Un bananier brut, broussailleux,
Bardé de bons et beaux bijoux.
Les babines bavant, elle en bâfrerait bien ;
Mais baste ! la bête est trop basse :
« Blettes, bougonne-t-elle, un brunch de béotien. »
Bénit-on ce bagout bonasse ?
L'Éléphant et les Endives. (E)Un éléphant d'Espagne, ou est-ce Equeurdreville,
À l'estomac exsangue, entrevoit, effaré,
Des endives qu'il estampille
Excellentes, mais enterrées.
L'énergumène envieux espère en excaver ;
Mais empêché de les extraire :
« Exécrable, émet-il, envoie-les aux Éwés. »
L'épisode est-il exemplaire ?
Robert et les Ramboutans. (R)Robert, un résident de Rouen... raté : Roubaix,
Rongeant son râtelier, regarde en reniflant
Un rouvre roux d'où retombaient
Des ramboutans ronds, rutilants.
Il rêve à ce ragoût qui réjouit le regard ;
Mais réalise le ratage :
« Ripoux, rigole-t-il, réservés aux ringards. »
Rire réel ou rouspétage ?
Le Tapir et les Tomates. (T) Un tapir de Toulouse, ou tantôt de Trouville,
Les tripes tenaillées et la tête tombante,
Trouve trois tomatiers tranquilles
Tendant leurs tomates tentantes.
Le type, titillé, tâche de les tirer ;
Mais tombe dans un trou à terre :
« Trop tendres, tonne-t-il, un truc pour des tarés. »
Faut-il tempêter ou se taire ?